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2021-03-29
Décarboner nos vies par la régénération des sols

Décarboner nos vies par la régénération des sols

Le carbone, ce fameux gaz si méprisé à l’heure actuelle... Parlons-en ! Aujourd’hui, nous l’associons aux énergies fossiles, à une ressource surexploitée par l’être humain. Mais qu’est-ce que le carbone en définitive ? De l’énergie. Bref, le dioxyde de carbone est à la base de toute vie sur Terre. Les plantes et les micro-organismes absorbent le dioxyde de carbone que contient l’atmosphère, puis grâce à la photosynthèse, ils utilisent l’énergie du soleil pour convertir le CO2 en oxygène. Les plantes et les arbres grandissent et finissent naturellement par mourir. Puis, les animaux mangent les plantes pour obtenir à leur tour de l’énergie, et ils rejettent du dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Éventuellement, les animaux meurent aussi. D’ailleurs, tous les êtres vivants sont faits de carbone et ils mourront tous, c’est inévitable. Le processus est finalement assez simple à comprendre, il s’agit du cycle de toute vie sur la planète. N’oublions pas que le dioxyde de carbone contenu dans l’atmosphère prend une partie de la chaleur qui quitte la Terre ; c’est ce qui permet à la planète de conserver une température qui assure notre existence et notre viabilité (l’effet de serre).

Plus récemment, l’espèce humaine s’est distinguée des autres espèces animales en commençant à sortir le carbone enfoui dans les sols, par l’extraction de ce que nous appelons désormais les énergies fossiles. Ce carbone provenant notamment d’animaux morts il y a des centaines, voire des milliers d’années se retrouve dorénavant libéré dans l’atmosphère en trop grande quantité. Cette exploitation se fait de façon intensive, insoutenable ; elle déstabilise forcément le cycle des vivants. Cette énergie est partout autour de nous, elle se retrouve dans ce qu’on mange, dans ce qu’on porte : intrusive et insidieuse.

Comme Yann Arthus-Bertrand le dit si bien dans son documentaire Legacy, notre héritage, « cette énergie qui nous a rendus si puissants et si riches est maintenant en train de nous tuer tout simplement. » La survie de l’humanité dépend de notre capacité à décarboner nos vies. Il n’y a pas d’autres solutions. En 1937, nous étions 2,3 milliards d’individus sur la planète, le carbone se situait autour de 280 ppm et les terres encore sauvages représentaient 66 % des étendues terrestres alors qu’aujourd’hui, la population mondiale avoisine les 7,8 milliards, le carbone est désormais de 415 ppm et les étendues sauvages ont diminué de moitié pour ne représenter que 35 % des terres.

Pire encore, selon les données de la WWF, en 50 ans, nous aurions perdu près de 70 % des mammifères, des oiseaux, des poissons, des amphibiens et des reptiles ! 70 % du vivant, ce n’est pas négligeable. À la lumière de ces faits, il est primordial de repenser notre rapport au monde sauvage et de protéger la biodiversité, car nous sommes en train de supprimer tout ce qui n’est pas humain sur la Terre. Par notre quête insatiable de richesses et d’énergie, nous avons libéré une trop grande quantité du carbone qui était enfoui dans la terre et, par le fait même, nous avons déstabilisé le cycle essentiel des vivants. Il y a désormais trop de carbone dans l’atmosphère, la Terre devient de plus en plus chaude au détriment de notre espèce et de toutes les autres. L’humain doit ainsi, de toute urgence, arrêter de libérer du dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Pour ce faire, il existe des pratiques efficaces et durables, à commencer par mettre fin à la déforestation et aux cultures industrielles et d’élevage qui mettent les sols terrestres en souffrance. Il faut trouver un moyen de régénérer les sols et d’emmagasiner le carbone dans la terre.

Le sol participe activement à la régulation du climat et à la purification de l’air. En effet, les sols contiennent deux à trois fois plus de carbone que l’atmosphère. Le carbone est compris dans les organismes vivants, dans la matière organique non vivante, de même que dans la matière inorganique. Lorsque les sols sont en santé, ils possèdent la capacité d’absorber le carbone additionnel et ainsi, de réguler le climat. Les micro-organismes contenus dans le sol peuvent également purifier l’air en décomposant les gaz toxiques. Malheureusement, aujourd’hui, c’est 33 % des sols qui sont dégradés à l’échelle planétaire ; ceux-ci contiennent moins de vie et de structure, ce qui entraîne une perte de leur habileté à procurer des services écosystémiques. Une telle perte implique des difficultés liées à l’absorption de l’eau et à la croissance des plantes entre autres choses. Les sols perdent ainsi leur contenu en carbone — libéré dans l’atmosphère —, ce qui a pour effet d’aggraver les changements climatiques.

La dégénération des sols est le fruit d’activités humaines comme la déforestation et le labour à outrance, mais aussi l’arrosage d’intrants chimiques dans les champs qui ont entravé le bon fonctionnement des micro-organismes des sols. Pourtant, de nombreuses pratiques existent pour assurer la régénération des sols et ainsi, favoriser une meilleure rétention du carbone. Nous devons restaurer la biologie des sols en améliorant son écosystème. Cette gestion régénératrice des sols comporte de nombreux avantages. En effet, l’absorption du carbone atmosphérique dans les sols et dans la biomasse des plantes contribue à amoindrir les changements climatiques, mais elle permet également d’augmenter la résistance à différents désastres naturels comme les sécheresses, les inondations, etc. Un sol sain favorise également des récoltes de nourriture plus riche en nutriments tout en accroissant la viabilité économique des agriculteurs.

Quelles sont les pratiques régénératrices à mettre en place si nous voulons assurer une meilleure absorption du carbone dans nos sols ? Il y en a plusieurs allant du non-labour du sol à l’agroforesterie, en passant par une couverture du sol. Il est essentiel d’introduire des cultures vivaces qui auront pour effet de rétablir la biodiversité, de restaurer l’équilibre des terres et d’assurer la survivance de nombreuses espèces animales. Un sol sain regorge de vie ; il n’est pas constitué que de matière organique et de minéraux, il est aussi et surtout l’habitat d’insectes, de vers de terre, d’innombrables espèces de champignons, de bactéries et de micro-organismes qui forment un réseau vital complexe et interdépendant.

Par une régénération des sols et une restauration de grandes parcelles de terres sauvages en plantant des arbres, nous pourrons assurer une meilleure absorption du carbone, cette énergie qui nous tue à une vitesse effroyable et inquiétante. Les actions humaines doivent être costaudes et cohérentes. La régénération des sols doit aller de pair avec une diminution de notre consommation de pétrole, de charbon et de gaz. C’est la seule solution. Il n’y en a malheureusement pas d’autres. Il faut impérativement répondre « présent » aux cibles d’émissions de GES de l’Accord de Paris si nous voulons assurer la pérennité de notre espèce. Nous devons faire quelque chose MAINTENANT. Autrement, en 2070, un tiers de l’humanité pourrait se retrouver à vivre dans des régions aussi chaudes que le Sahara !

Nous devons agir, car ce sont des pays comme le nôtre qui participent à la mort de nombreuses espèces animales et aux changements climatiques qui pourraient bien contraindre une grande part des habitants de la planète à se délocaliser pour éviter la vie dans des régions trop chaudes et arides. La plus grande injustice est certainement que la quête de richesse énergétique est le fruit d’une minorité ; 70 % des émissions de GES sont émises par 10 % de la population mondiale, et nous en faisons partie ! Les aspirations économiques de la minorité risquent de condamner la majorité des habitants de la Terre d’où l’importance de faire preuve d’introspection individuellement et collectivement pour mettre en place des mesures efficaces pour renverser la vapeur, pour canaliser nos dégâts.

Stéphanie St-Pierre

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