Marché local
2021-06-15
L'importance d'assurer une agriculture saine et durable

L'importance d'assurer une agriculture saine et durable

La saison agricole est déjà bien amorcée au Québec. Les champs verdissent, le cycle de culture habituel suit son cours, et avec ce dernier, celui des pesticides aussi, malheureusement. Il est pourtant plus que temps de minimiser et de réglementer l’utilisation des pesticides dans les champs de la province. On ne le soulignera jamais assez, la santé et la sécurité prévalent sur l’enrichissement et la croissance économique. Selon un rapport du MAPAQ, les trois quarts des fruits et légumes frais du Québec contiennent des résidus de pesticides, et près de 5 % de ces derniers en comportent trop !

Au Québec, le rôle des agronomes est à la fois de prescrire et de vendre des pesticides, ce qui constitue une véritable aberration. D’ailleurs, l’Ordre des agronomes refuse d’interdire à un agronome qui conseille des agriculteurs dans l’utilisation de pesticides ou d’engrais d’être rémunéré par une entreprise liée à la fabrication, à la distribution ou encore, à la vente de tels produits. Dans un tel contexte, il apparaît difficile, pour l’OAQ, de justifier qu’il répond à sa mission première, qui est celle de défendre l’intérêt public.

De ce fait, il est primordial que l’Ordre des agronomes implante un code de déontologie qui assure l’indépendance professionnelle des agronomes. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, la Loi sur les agronomes date de la fin de la Deuxième Guerre mondiale ; il est facile d’imaginer que les méthodes de même que les produits chimiques utilisés ont bien changé depuis cette époque. Les Québécois sont en droit de s’attendre à plus de transparence de la part des agronomes et des producteurs maraîchers de la province ; leurs récoltes risquent bien de se retrouver dans leur assiette après tout.

En avril dernier, Louis Robert publiait le livre Pour le bien de la terre qui a eu un effet « coup de poing » dans les médias. Rappelons qu’en 2018, ce dernier s’est fait connaître comme lanceur d’alerte, lorsqu’il s’est publiquement indigné des pressions exercées par les compagnies d’engrais et de pesticides sur les gestionnaires de l’agriculture québécoise. Il dénonçait alors l’ingérence du privé dans la recherche publique sur les pesticides.

En janvier 2019, il avait été congédié pour avoir transmis des documents confidentiels à Radio-Canada. Pourtant, l’alerte lancée par Louis Robert était plus que justifiée ; elle concernait l’intérêt public, la santé et la sécurité des citoyens. Les lobbys de l’industrie agricole doivent être repoussés pour laisser place à des instances indépendantes et empreintes de transparence.

En 2018, l’agronome, qui a plus de 34 ans d’expérience, a dénoncé une situation inacceptable et trois ans plus tard, peu de solutions ont été apportées, peu d’actions ont été entreprises pour veiller à ce que les intérêts de la population prennent le dessus sur les intérêts des compagnies de pesticides. Dans son ouvrage d’une grande lucidité, Louis Robert explique que « [c] e n’est pas tant que les lobbys sont puissants, c’est la vigilance de nos institutions qui fait défaut, c’est la mollesse des administrateurs qui négligent leurs responsabilités au profit de ces groupes d’intérêts qui nous mettent dans une telle situation. » Ce qui est demandé par Louis Robert, c’est la mise sous tutelle de l’Ordre des agronomes. Il est impensable que les agronomes puissent être en conflit d’intérêts ; ils ne peuvent décemment être des « vendeurs » auprès des maraîchers. Comment peuvent-ils exercer adéquatement leur profession s’ils sont affiliés aux intérêts de marchands de pesticides et d’engrais ?

N’étant ni agronome ni spécialiste des questions agricoles au Québec, mon approche n’est pas celle d’une professionnelle, mais plutôt celle de la citoyenne qui constate un manque d’éthique et une négligence marquée de la part des institutions. Pourtant, il existe des solutions pour remplacer les engrais et les pesticides, de nombreuses recherches scientifiques en parlent.

En tant que citoyens et citoyennes, nous sommes en droit de demander au gouvernement et aux institutions davantage de vigilance et de transparence, dans le but d’assurer notre sécurité et notre santé. Après tout, les cultures de nos champs nous sont destinées. Nous avons le pouvoir d’exiger plus de la part de l’État, de réclamer un plan d’action pour une agriculture saine et durable qui sera effectif dans les meilleurs délais. Le gouvernement doit démontrer qu’il mérite notre confiance, puis le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation doit faire son travail avec diligence et impartialité.


Stéphanie St-Pierre

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