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2020-11-25
Réanimer l'espoir : faire front commun pour combattre l'inaction de l'État

Réanimer l'espoir : faire front commun pour combattre l'inaction de l'État

L’année tire doucement à sa fin. 2020 sera bientôt derrière nous et laissera place à une nouvelle année ; il y a, cela dit, tout un mystère autour de l’année à venir. Entre l’espoir de la mise au point d’un vaccin miraculeux qui nous rendra notre vie d’avant, puis de la diminution tant souhaitée du nombre d’infections, et la crainte d’une nouvelle année de restrictions et de confinement, on n’ose imaginer ce qui se produira. Lorsque l’année 2019 s’est terminée, après la grande manifestation pour le climat qui s’est tenue le 27 septembre, nombre de citoyens et de défenseurs de l’environnement nourrissaient la douce espérance que 2020 soit une année importante pour l’écologie. La mobilisation des Québécois pour la planète était en soi un message empreint de promesses. Un an plus tôt, en novembre 2018, le lancement du Pacte pour la transition, en réponse à l’appel du Secrétaire général des Nations unies pour une mobilisation massive de la société civile en regard de l’urgence climatique, avait également donné un nouveau souffle à la cause environnementale.

Force est de constater que l’année 2020 s’est avérée un véritable fiasco pour les enjeux environnementaux. Tous les efforts déployés se sont avérés vains avec l’arrivée de la pandémie. Le gouvernement a fait appel à la collaboration des citoyens afin de « combattre » le virus. Nombreux sont les politiciens du Québec, mais également du monde entier, à s’être dotés de métaphores guerrières pour expliquer la grande bataille qui devait et doit, encore aujourd’hui, avoir lieu pour contrer la COVID-19. C’est triste à dire, mais quand a-t-on entendu un tel langage dans la bouche de nos politiciens en ce qui concerne l’environnement et les changements climatiques ? Je n’ai pas souvenir de conférences de presse ou de discours un tantinet éloquent concernant le sauvetage de nos écosystèmes et, in fine, de notre espèce.

Il ne s’agit aucunement de rejeter l’existence d’un virus inquiétant qui aura eu raison de nombreuses vies jusqu’ici et de la santé de beaucoup d’autres, mais de constater, avec une certaine amertume, peut-être, que tous les sujets ne touchent pas d’une même façon l’État. Celui-ci se targue de vouloir assurer notre bien-être et notre sécurité, mais cela passe aussi, et surtout, par la protection de notre environnement. La planète que nous habitons nous offre ce dont nous avons besoin pour vivre : de l’air et un habitat sain. Les instances gouvernantes dédaignent pourtant cette considération ô combien nécessaire à notre survivance !

Récapitulons. 2020 est passée avec force et violence, le Pacte pour la transition s’est effrité jusqu’à son démantèlement au début du mois de novembre. Dominic Champagne, son instigateur, y a mis un terme après avoir porté son message à bout de bras, et de force, pendant deux ans auprès des ministres du gouvernement en se heurtant à un manque d’ambition, mais aussi de conscience — les politiciens sont rarement des visionnaires, plutôt des individus pragmatiques et corporatistes. Ceux-ci nous servent souvent la même rengaine : « Nous devons éviter la récession, assurer la croissance économique… La santé de l’économie, la profitabilité, l’enrichissement des contribuables… » Ce qui ressort du discours de Dominic Champagne, c’est un profond sentiment d’impuissance mêlé à une vive déception : « Nos gouvernements ont entendu nos voix. Mais force est de constater qu’ils n’ont pas livré. On dira ce qu’on voudra, nos gouvernements n’ont pas répondu à l’appel des scientifiques. Oui, ils ont bien joué le jeu. Eh oui, il y a eu des progrès. Mais rien qui soit convaincant, rien de véritablement significatif, rien de déterminant. Rien qui nous donne l’espérance qu’on soit en train de prendre le taureau par les cornes et de la gagner, la lutte. » Puis, le « fameux » plan pour une économie verte du gouvernement Legault est finalement arrivé, sans promesse, sans envergure, sans engagement : inutile.

Dans son plan, le gouvernement caquiste annonce qu’il injectera quelque 6,7 milliards de dollars d’ici 2026, dans le but d’arrimer la relance économique avec une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Après avoir parcouru le « plan vert », on se rend rapidement à l’évidence que la priorité de ce gouvernement est d’électrifier le secteur des transports, sans remettre en question la légitimité d’un aussi grand parc automobile et l’utilisation de la voiture solo. Il apparaît pourtant logique que l’atteinte des cibles de 2030 nécessite d’abord de revoir notre approche de l’urbanisme, de mettre en place une politique d’aménagement du territoire et une politique de mobilité transformatrice avant même de songer à l’électrification du parc automobile. Le ministère de l’Environnement a d’ailleurs fermé la porte à toute taxation qui aurait pour cible les véhicules polluants. Même les investissements dans le secteur des industries manquent d’ampleur afin de développer des énergies vertes et renouvelables. Le gouvernement en place se refuse d’ailleurs à l’instauration d’une cible ambitieuse en ce qui a trait à ses engagements pour le climat. Il évite ainsi d’avoir à respecter une obligation, un objectif à atteindre coûte que coûte.

Le PEV du gouvernement Legault est tout simplement insuffisant. Par l’exclusion de toutes mesures contraignantes envers les grands pollueurs, il réaffirme son manque d’ambition et de vision. C’était pourtant l’occasion de proposer des moyens de réduire la taille de notre empreinte écologique et, par le fait même, de créer de la richesse sociale. Il aurait pu témoigner de son engagement envers l’environnement et la population québécoise en finançant l’économie circulaire, la réduction du gaspillage alimentaire, l’efficacité énergétique, la production d’énergies renouvelables, le transport collectif, l’agriculture biologique, l’économie sociale, etc. La réalité est que les instances en place ne se dotent pas des moyens nécessaires à la lutte aux changements climatiques.

Mais l’année 2020 tire sa révérence très bientôt, n’est-ce pas là l’occasion toute désignée de redonner un nouveau souffle à notre engagement pour le climat, pour cette belle planète que nous habitons. Le rapport de force qui nous a fait croire que 2020 serait une année phare pour l’environnement doit être réanimé. Il ne faut pas minimiser le pouvoir de la mobilisation ; nous avons la capacité de faire pression sur l’État, de remettre en question ses prises de décisions. L’espoir de 2021 ne serait-il pas qu’ensemble, en se mobilisant, on peut faire bien plus que tout seul, dans l’inaction ? La force du nombre est puissante, immensément puissante.

Stéphanie St-Pierre

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